Si ma grand-mère écrivit un peu et ma foi fort bien, c'est bien son cousin Bernard Clavel qui fut LA plume de ma famille. Parti aujourd'hui en d'autres sphères, je voulais ici lui rendre un hommage, à lui qui, notamment au travers sa première fresque "La grande patience", a bercé mon univers du sien, lui le petit apprenti parti de rien qui grimpa jusqu'au firmament de la littérature.
Je ne puis que conseiller aux lecteurs de ce modeste billet son premier ouvrage, "La maison des autres", un bijou que chaque jeune de notre société de l'immédiat et de l'asepsie devrait avoir dans sa bibliothèque.
Bernard Clavel, auteur d'une oeuvre prolifique et humaniste - Portrait
Par Claude CASTERAN
PARIS, 5 octobre 2010 (AFP) - Autodidacte ancré dans ses terres du
Jura ou des pays du Rhône, Bernard Clavel, qui vient de mourir à l'âge
de 87 ans, était l'auteur d'une oeuvre prolifique et humaniste qui
avait rencontré en son temps un vif succès populaire.
Lauréat du Goncourt 1968 avec "Les fruits de l'hiver", Bernard Clavel a
vendu ses livres, marqués par le réalisme social, par millions: il
était encore classé 3e écrivain préféré des Français, selon un sondage
paru en 1997.
Personnalité engagée et non conformiste, militant de la paix et des
droits de l'homme, il a écrit une centaine de titres, -romans, sagas,
nouvelles, livres pour enfants-, publiés en cinquante ans d'une
carrière menée à l'écart du milieu littéraire parisien, mis à part ses
années d'académicien Goncourt (1971-1977).
De la colère dans le regard, chauve, la voix ardente, Bernard Clavel
était un homme chaleureux et souvent râleur, détestant parler de lui.
Plus à l'aise dans les grands espaces que dans les salons, il puisait
son inspiration dans une jeunesse turbulente et dans la nature qu'il
vénérait : son Jura natal, le Rhône mais aussi les immensités du Canada
où il s'était un temps installé.
"Ma rencontre avec le Rhône est l'un des tournants les plus importants
de ma vie. C'est lui qui m'a amené à écrire", expliquait celui qui
rêvait d'abord d'être peintre, choix auquel s'opposa son père.
Bernard Clavel n'est pas venu facilement à l'écriture. "J'en ai bavé",
disait-il à propos de ses débuts. Josette Pratte, romancière québécoise
devenue sa seconde épouse, va devenir une juge impitoyable pour ses
textes: "Je n'aurais pas écrit pareillement sans elle", confiait-il.
Né le 29 mai 1923 à Lons-le-Saunier (Jura), fils d'une fleuriste et
d'un boulanger, Bernard Clavel abandonne l'école à 14 ans pour devenir
en 1937 apprenti-boulanger à Dole, sous la coupe d'un patron brutal
qu'il quitte au bout de deux ans. De cette pénible expérience, il tire
un roman: "La Maison des autres" (prix du roman populiste, 1962).
Pour échapper au Service du travail obligatoire (STO) pendant la
guerre, il est ouvrier dans une chocolaterie, polisseur de verres de
lunettes, ouvrier agricole, bûcheron, lutteur de foire ("L'Hercule sur
la place", 1966). Cette époque sera son "université", selon sa formule.
Un peu comme cet écrivain qu'il admirait tant, Jack London. Après la
guerre, il est employé à la Sécurité sociale et dans la presse.
Il consacre ses deux premiers romans au fleuve : "Vorgine", paru
d'abord en 1955 en feuilleton dans Le Progrès de Lyon où il est
rédacteur, puis édité par la suite sous le titre "Les Pirates du
Rhône", et "L'Ouvrier de la nuit", son premier roman publié par René
Julliard en 1956, qui campe un héros prêt à tout sacrifier à sa
vocation artistique.
Ses livres sont vite salués par des écrivains reconnus comme Pierre Mac
Orlan qui voit dans son oeuvre "une victoire de la paysannerie lettrée".
Son premier cycle romanesque, "La Grande patience" (en quatre volumes)
est une fresque de la vie ouvrière rurale. Héritier des
feuilletonistes, il publie ensuite plusieurs sagas comme "Les Colonnes
du ciel" (cinq volumes) ou "Le Royaume du Nord" (six volumes).
Il écrit ensuite avec régularité des romans, d'inspiration
autobiographique, ou à connotation sociologique, comme "Malataverne"
(1961), "Cargo pour l'enfer" (1993), "Le Soleil des morts" (1998),
"Retraite aux flambeaux" (2002) ou "Les Grands malheurs" (2004).
Toujours, il parle "des gens de peu".
Père de trois enfants, il a aussi beaucoup écrit pour la jeunesse et était fréquemment étudié en classe.
En 1977, il avait démissionné de l'Académie Goncourt (pour mieux se
consacrer à l'écriture, avait-il expliqué). Il avait par ailleurs
refusé par deux fois la légion d'honneur.
ccd/cha/mmr
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