Bien vue des marchés, la France paraît à l'abri d'un scénario à la grecque

PARIS, 29 avril 2010 (AFP) - Face au risque de contagion de la crise grecque à d'autres pays de la zone euro, la France n'a pour le moment aucune raison de s'inquiéter, car malgré des finances publiques exsangues, elle bénéficie de la confiance des investisseurs, assurent gouvernement français et économistes.
L'une des trois grandes agences de notation, Standard and Poor's (SP), a dégradé mercredi la note de la dette souveraine de l'Espagne, plaçant ainsi un troisième pays de la zone euro au coeur de la tourmente qui agite les marchés, au lendemain de décisions similaires sur la Grèce et le Portugal.
Désormais, même les Français ne se sentent plus à l'abri: les trois quarts d'entre eux estiment que la France pourrait connaître une situation comparable à celle de la Grèce, selon un sondage.
Un risque balayé jeudi par le ministre du Budget, François Baroin: "il n'y a pas de risque de voir la note (de la France) abaissée", a-t-il assuré.
Les notes des trois agences, SP, Moody's et Fitch, censées déterminer la capacité à rembourser des Etats et des entreprises, sont très suivies sur les marchés pour prendre des décisions d'investissement.
Or comme l'Allemagne, la Finlande ou les Pays-Bas, la France est notée "AAA" par ces trois agences, soit la meilleure note possible, ce qui lui permet d'emprunter à des taux avantageux.
A l'inverse, la Grèce est prise dans un cercle vicieux: déjà confrontée à une énorme dette, elle ne peut plus emprunter qu'à des taux prohibitifs.
Si la France est bien notée, c'est parce que ses "fondamentaux" sont jugés solides, souligne-t-on à Bercy: sa croissance est suffisante pour faire face à ses échéances de remboursement. Et si sa dette (prévue en 2010 à 83,2% du Produit Intérieur Brut (PIB, ensemble des richesses produites dans un pays) et son déficit public (attendu à 8% du PIB en 2010) ont atteint des niveaux record, ils restent inférieurs à ceux d'autres pays de la zone euro.
"On est même une signature refuge", a avancé François Baroin.
Contrairement à la Grèce, honnie des investisseurs, la France pourrait en effet bénéficier d'une "fuite vers la qualité", ses obligations étant très demandées car considérées comme peu risquées.
"On ne peut jamais exclure un risque de contagion", estime Hervé Boulhol, économiste à l'OCDE. Mais "la crise grecque est très spécifique", souligne-t-il: "le pays est confronté à un problème d'endettement public mais aussi à un problème de confiance lié à la falsification de ses comptes, qu'on ne retrouve pas dans les autres pays de la zone euro".
"Il y a toujours un risque, mais il faudrait un scénario catastrophe pour que la France soit touchée" par un effet "domino", juge aussi Philippe Martin, professeur d'économie à Sciences-Po.
"Son système fiscal est efficace, sa dette est plutôt bien gérée, son déficit est élevé mais moindre que dans un pays comme l'Espagne, et ses perspectives de croissance meilleures", ajoute-t-il.
Les banques françaises sont certes engagées à hauteur d'une cinquantaine de milliards d'euros en Grèce. "Ce sont des montants importants mais qui ne remettent pas en cause la stabilité du système financier français", juge Philippe Martin.
En outre "l'endettement du secteur privé (ménages et entreprises) est assez faible en France", souligne Brian Coulton, analyste chez Fitch.
"Cela étant dit, même si elle n'est pas encore trop préoccupante, la dette de la France est élevée et le pays va devoir faire des efforts pour la réduire", prévient-il.
La France s'est engagée auprès de Bruxelles à redresser progressivement ses comptes publics.
A Bercy, on reconnaît que la bonne notation de la France est "un bien précieux qu'il faut entretenir".
"La priorité des priorités, c'est évidemment de réduire les déficits", a de son côté assuré François Baroin.
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